Gab Pêche : le pari audacieux d’un Gabon qui veut pêcher sa liberté

Le lundi 11 août 2025, Libreville a jeté l’ancre sur une ambition claire : sortir la pêche artisanale gabonaise de l’ombre des importations. Dans le 5ᵉ arrondissement, la ministre de la Mer, de la Pêche et de l’Économie bleue, Laurence Ndong, a donné le coup d’envoi du projet Gab Pêche. Une phase pilote avec 20 pirogues flambant neuves et un appui logistique, censée créer près de 500 emplois directs. Derrière les chiffres, une promesse : celle d’un secteur qui nourrit ses propres enfants.
Le plan est simple sur le papier, mais colossal dans ses implications. D’ici quelques années, 700 pirogues équipées, fabriquées localement, devraient sillonner les côtes gabonaises. Le poisson, capturé par des mains gabonaises, sera vendu uniquement par des marieuses gabonaises. Du filet à l’assiette, toute la chaîne sera nationale. Une offensive économique et patriotique, dans un pays où le poisson est parfois devenu un luxe pour des familles entières.
Sur le terrain, l’enthousiasme est palpable. « Ce n’est pas seulement une question d’outils, mais de rendre nos pêcheurs autonomes et fiers de leur métier », martèle la ministre. Pour Arsène Édouard Nkoghe, délégué spécial du 5ᵉ arrondissement, Gab Pêche est « une réponse à une attente forte » qui pourrait revitaliser tout un écosystème : artisans constructeurs, transformateurs, commerçants… Tous pourraient tirer profit de cette nouvelle vague.
Mais l’océan n’est jamais sans tempêtes. L’initiative devra composer avec des ressources halieutiques menacées, la nécessité de former les pêcheurs aux équipements modernes, et un impératif de logistique solide pour que la “Gabonisation” ne reste pas qu’un slogan. Sans investissements massifs dans les infrastructures portuaires, la chaîne risque de se briser avant d’atteindre sa pleine puissance.
Les autorités jurent pourtant que le cap est fixé : pêche responsable, contribution au PIB au-delà des 1,5 % actuels, prix stables pour le consommateur. Mais le succès tiendra moins aux discours qu’à la capacité de suivre, contrôler et corriger la trajectoire en temps réel. La mer, elle, ne pardonne pas les navigations à vue.
Pour les pêcheurs, Gab Pêche est déjà plus qu’un programme : c’est une déclaration d’indépendance. « Ce projet, c’est plus qu’un bateau et des filets. C’est la promesse que notre travail nourrira notre peuple », confie l’un d’eux. Reste à transformer cette promesse en une réalité durable, capable de faire flotter haut le pavillon d’une pêche gabonaise libre, prospère et fière.